Mêlant le témoignage de Gabriele à ses propres réflexions, et utilisant comme toujours son humour et son sens de la formule, Amandine Dhée atteint l'objectif qu'elle s'était fixé : « écrire un livre réconfortant sur la mort ». L'occasion de réfléchir avec elle sur nos propres angoisses, sur notre désir de transmission, sur les pertes et les liens qui unissent les êtres et qui marquent les générations. Liant l'intime au politique, Sortir au jour est aussi un texte qui questionne nos façons de faire société... On pourrait lire Sortir au jour comme un texte qui parle de la perte, mais c'est exactement l'inverse. Sortir au jour raconte ce qui nous lie.
Elsa a sept ans lorsque sa mère devient pour la première fois propriétaire. Dans le nouvel appartement, il y a une moquette vert menthe à poils ras, une chambre bleue avec des lits superposés, un frigidaire jaune, un palmier dans le crépuscule sur un mur de la salle de bains. La nuit, la mère ne dort pas. Elle fume. Blottie sous sa couette, l'enfant regarde les cloques qui boursoufflent le plafond.
L'Âge de détruire est l'histoire d'une violence qui passe de mère en fille. Un cycle infernal, dont il faudrait s'échapper ; et pour cela avancer jusqu'à atteindre, peut-être, l'âge de détruire.
« J'ai eu peur de mon désir... Je me sentais aspirée vers le fond, vers une noirceur exquise. Je sentais que vivre, pour une fois, rivalisait avec l'intensité et l'ivresse de la mort ».
À force de désir, d'émotion, de douleur, l'auteure de ces lignes a connu plusieurs morts, pour revivre avec une ardeur insolente.
Depuis l'adolescence, elle teste les contours de son corps, de son être et de sa liberté, sans demander la permission d'exister.
La révolte dans la peau, elle dresse un témoignage incisif et lucide sur la manière de vivre, la violence familiale, la maladie mentale, et les relations sexuelles. Comment assumer puis rejeter les agressions subies depuis l'enfance et l'adolescence pour ne plus jamais être le jouet des hommes.
Récit intime, chant d'amour, manuel de survie, manifeste libératoire, ce texte est une déferlante de sensibilité, riche en leçons de vie. Une oeuvre franche, abrasive, lumineuse, de l'intensité vitale de Putain de Nelly Arcan ou du King KongThéorie de Virginie Despentes.
Michelle Lapierre-Dallaire est née au Lac-Saint-Jean en 1993. Elle vit à Gatineau. Y avait-il des limites si oui je les ai franchies mais c'était par amour ok est son premier roman.
La cour est vide. La maison est fermée. Claire sait où est la clef, sous une ardoise, derrière l'érable, mais elle n'entre pas dans la maison. Elle n'y entrera plus. Elle serait venue même sous la pluie, même si l'après-midi avait été battue de vent froid et mouillé comme c'est parfois le cas aux approches de la Toussaint, mais elle a de la chance ; elle pense exactement ça, qu'elle a de la chance avec la lumière d'octobre, la cour de la maison, l'érable, la balançoire, et le feulement de la Santoire qui monte jusqu'à elle dans l'air chaud et bleu.
Années 1960. Isabelle, Claire et Gilles vivent dans la vallée de la Santoire, avec la mère et le père. La ferme est isolée de tous.
Après l'immense succès du Grand Monde Un ogre de béton, une vilaine chute dans l'escalier, le Salon des arts ménagers, une grossesse problématique, la miraculée du Charleville-Paris, la propreté des Françaises, « Savons du Levant, Savons des Gagnants », les lapins du laboratoire Delaveau, vingt mille francs de la main à la main, une affaire judiciaire relancée, la mort d'un village, le mystérieux professeur Keller, un boxeur amoureux, les nécessités du progrès, le chat Joseph, l'inexorable montée des eaux, une vendeuse aux yeux gris, la confession de l'ingénieur Destouches, un accident de voiture. Et trois histoires d'amour.
Un roman virtuose de Pierre Lemaitre
Dans le brouhaha des rues agitées de Téhéran, Leyla, Shabaneh et Roja sont à l'heure des choix. Trois jeunes femmes diplômées, tiraillées entre les traditions, leur modernité et leurs désirs.
Leyla rêve de journalisme ou de devenir libraire. Son mari, pourtant aimant et attentionné, a émigré sans elle. A-t-elle eu raison de ne pas le suivre et de rester ? Shabaneh est courtisée par son collègue, qui voit en elle une épouse parfaite. Comment démêler si elle l'aime, si elle peut se résoudre à abandonner son frère handicapé, alors qu'elle en est l'unique protection ? Roja, la plus ambitieuse, travaille dans un cabinet d'architectes, et s'est inscrite en doctorat à Toulouse - il ne manque plus que son visa, passeport pour la liberté. Vraiment ?
La solution est-elle toujours de partir ?
En un été et un automne, elles vont devoir décider. D'espoirs en incertitudes, de compromis en déconvenues, elles affrontent leurs contradictions entre rires et larmes, soudées par un lien indéfectible mais qui soudain vacille, tant leurs rêves sont différents. L'automne est la dernière saison est une magnifique histoire d'amour et d'amitié, sensible et bouleversante, profondément ancrée dans la société iranienne d'aujourd'hui, et pourtant prodigieusement universelle.
Une musique libre et joyeuse s'élève des pages de ce premier roman : celle d'un choeur de femmes saluant la venue au monde de la petite Ève, enfant née d'un désir d'amour inouï.
Stéphanie est cheffe de cuisine, elle voulait être mère, mais pas d'une vie de couple. Elle est allée en Espagne bénéficier d'une procréation médicalement assistée, alors impossible en France. Greg, l'ami de toujours, a accepté de devenir le « père intime » d'Ève. Dans à peine deux semaines, aura lieu la fête en blanc organisée pour célébrer la naissance de leur famille atypique, au grand dam de la matriarche aigrie et vénéneuse qui trône au-dessus de ces femmes.
À l'approche des réjouissances, chacune d'elles est conduite interroger son existence et la place que son corps y tient. Toutes, soeurs, nièces, amies de Stéphanie, témoignent de leur quotidien, à commencer par Ève elle-même, à qui l'autrice prête des pensées d'une facétieuse ironie face à l'attendrissement général dont elle est l'objet. Comme dans la vie, combats féministes, tourments intimes et préparatifs de la fête s'entremêlent.
Camille Froidevaux-Metterie dépeint avec une grande finesse cette constellation féminine, tout en construisant un roman dont les rebondissements bouleversent : rien ne se passera comme l'imaginent encore Stéphanie et Jamila, la nounou d'Ève, s'activant la veille du festin tant attendu.
Tour à tour mordante et tendre, l'écriture, dans sa fluidité et ses nuances, révèle un véritable tempérament d'écrivaine.
Dans la ville de Boston, la clinique de Mercy Street offre un nouveau départ aux femmes désireuses d'avorter. C'est là que Claudia travaille depuis des années. Chaque jour, elle affronte la peur et la détresse de nombreuses patientes aux destinées bouleversées. À cela s'ajoute la détermination des militants anti-avortement dont la présence quotidienne aux alentours de la clinique rend l'ambiance tendue, sinon dangereuse. Pour faire face à cette pression constante, Claudia fréquente un sympathique dealer d'herbe, Timmy, qui compte parmi ses clients un jeune homme introverti et solitaire. Sur une plateforme en ligne, ce dernier se met au service d'un gourou pro-vie qui commence peu à peu à développer une fixation sur Claudia.
Poignant, juste et d'une actualité brûlante, Mercy Street, le nouveau roman de Jennifer Haigh explore les ambiguïtés et les failles d'une société au bord de l'explosion.
Nés sous deux étoiles différentes, Mungo le protestant et James le catholique vivent dans un monde hyper-violent où les gangs se livrent une bataille territoriale sans merci au nom d'une idée de la réputation ultra-virile à défendre. Pour être considérés comme des hommes, « des vrais », Mungo et James devraient être des ennemis jurés. Pourtant, les deux garçons s'aiment voyant l'un chez l'autre l'espoir d'un ailleurs.
Mungo doit alors travailler dur pour cacher cet amour interdit, en particulier à son frère aîné Hamish, un chef de gang local, prêt à tout pour défendre son honneur.
Lorsque Mo-maw, la mère de Mungo, l'envoie pour une partie de pêche sur le loch avec deux hommes, « des vrais », qui ont promis à Mo-Maw de faire de lui un homme, un vrai, c'est toute sa vie qui va basculer.
Servi par une écriture nerveuse et étincelante, Mungo brosse le portrait d'un jeune homme qui tente de faire entendre sa vérité dans un lieu et une époque qui exigent une stricte conformité aux normes de classe et de genre.
Sublime roman [...] Harlem Shuffle est un page turner comme Colson Whitehead sait si bien en faire. Livres HebdoPetites arnaques, embrouilles et lutte des classes... La fresque irrésistible du Harlem des années 1960.Époux aimant, père de famille attentionné et fils d'un homme de main lié à la pègre locale, Ray Carney, vendeur de meubles et d'électroménager à New York sur la 125e Rue, « n'est pas un voyou, tout juste un peu filou ». Jusqu'à ce que son cousin lui propose de cambrioler le célèbre Hôtel Theresa, surnommé le Waldorf de Harlem...Chink Montague, habile à manier le coupe-chou, Pepper, vétéran de la Seconde Guerre mondiale, Miami Joe, gangster tout de violet vêtu, et autres flics véreux ou pornographes pyromanes composent le paysage de ce roman féroce et drôle. Mais son personnage principal est Harlem, haut lieu de la lutte pour les droits civiques, où la mort d'un adolescent noir, abattu par un policier blanc, déclencha en 1964 des émeutes préfigurant celles qui ont eu lieu à la mort de George Floyd.Avec Harlem Shuffle, qui revendique l'héritage de Chester Himes et Donald Westlake, Colson Whitehead se réinvente une fois encore en détournant les codes du roman noir. C'est vivant, bruyant, caracolant. C'est Whitehead. L'Obs Un réjouissant tourbillon [...] Une belle leçon d'histoire et d'humanité en mode thriller. Les Echos
Dotant un professeur de philo d'un stoïcisme féroce et joyeux, Fernando Aramburu donne à voir les vicissitudes d'un homme, apparemment sans qualités, qui entend mettre un terme à cette comédie tragique qu'est la vie. Pendant 365 jours, il consigne invariablement et sans filtre aucun les faits saillants de son existence : les rêves débridés et les petites misères d'un homme un peu dépassé par la marche du monde mais à la mauvaise foi inébranlable !
Ce jour-là, Penda aurait préféré ne pas décrocher le téléphone et éviter les mauvaises nouvelles. Trop tard, elle apprend que son copain Jimmy est hospitalisé après une garde à vue. Sa mère est introuvable, alors le médecin cherche à contacter Mami Pirate, grand-mère de Penda et voisine bienveillante du malheureux Jimmy.
Rien ne va plus. Penda elle-même vient de se faire virer de la supérette du coin où elle était caissière depuis la fin de ses études. Elle pense à rejoindre le cabinet de guérisseuse de Mami Pirate. Pour cela, il faut que sa grand-mère l'initie au Bwiti, cérémonie traditionnelle gabonaise consistant à entrer dans un autre état de conscience, afin de se laver des maladies de l'âme et des pathologies psychiques. Dans l'espoir de sauver Jimmy, Penda se lance mais son apprentissage est compromis par un être qu'elle a la faculté de ressentir depuis l'enfance, quand d'autres ne peuvent ni le voir ni l'entendre : son djinn.
A cheval entre deux cultures et deux visions du monde, Penda s'interroge sur ses propres croyances, ainsi que sur la maladie mentale dont Jimmy est atteint.
Heureusement, au quartier, il y a les autres, Chico le dealer attachant avec lequel Penda a grandi, Shango la grande soeur protectrice, Sally l'amie dont elle s'est éloignée. Chacun à sa manière va contribuer à révéler ce qu'il y a de plus cher aux yeux de Penda, la liberté.
Sorcellerie versus psychiatrie ? Djinn blanc contre djinn noir ? Langue de la rue, langue de l'école ? Retour au pays ou cheminement vaille que vaille dans une société peu accueillante ? Dans une langue hybride et teintée d'oralité, Djinns est tissé d'élans de tendresse, de colères tues, et met au centre le pouvoir de l'imaginaire.
1977. Californie du Nord. Rich est de ces bûcherons qui travaillent au sommet des arbres. C'est un métier dangereux, dont son père et son grand-père sont morts. Il veut une vie meilleure pour sa femme Colleen et son fils Chub. Pour cela, il a investi en secret toutes leurs économies dans un lot de séquoias pluricentenaires. Mais lorsque Colleen, qui veut avoir un deuxième enfant malgré de précédentes fausses couches, se met à dénoncer la compagnie d'abattage pour l'usage d'herbicides responsable selon elle de nombreuses malformations chez les enfants, le conflit s'invite au coeur de leur couple. Un premier roman âpre et dense.
Une femme mène dans les bois une existence vagabonde et sans artifices, avec pour unique demeure un vieux camion qu'elle déplace au gré de ses envies. Seuls comptent pour elle l'écoulement du temps et les échos du vivant. Heureuse de son dénuement matériel, elle se livre dans la forêt à la jouissance de ses sens et de ses pensées.
Marc Graciano aime expliquer qu'il se perçoit plus réalisateur qu'écrivain, qu'il est surtout un facteur, façon simple et taquine d'affirmer qu'il écrit ses textes comme un artisan crée des instruments de musique. Et si son oeuvre demeure romanesque, il n'a de fait jamais caché son désir de fonder une écriture magique, capable de raviver simplement et minutieusement la texture du monde. Vivant lui-même une grande partie de l'année dans un camion qu'il déplace dans la nature, Marc Graciano nous offre avec Shamane la figure d'un alter ego, une femme qui s'abandonne avec une égale jouissance aux arts martiaux et au vin, aux expériences chamaniques et à la vie dans les bois.
À travers huit actes reproducteurs, huit générations d'une même famille sont ici mises en scène, illustrant les rapports entre les femmes et les hommes à travers les siècles. Qu'il s'agisse du désir partagé ou non, du droit de cuissage, de l'adultère, du sexe cool, du matching génétique, le lecteur est témoin de l'évolution des moeurs et des renversements sociétaux qui ont conduit de la domination masculine à l'après Me Too. Si les relations entre les protagonistes se succèdent et ne se ressemblent pas, un véritable fil conducteur les relie toutes : la fécondation, processus biologique à l'origine de la vie. Partant du cellulaire pour atteindre une dimension psychologique et émotionnelle forte, Laurent Quintreau ne cesse de surprendre et de confirmer son talent de conteur.
«Je ne savais pas que les enfants avaient failli se faire tuer dans le volume précédent.Quand j'ai appris que c'était Pépère qui avait fait le coup, j'ai pigé un truc:qui ne connaît pas Pépère ne sait pas de quoi l'être humain est capable.»Benjamin Malaussène
Walter Benjamin, l'un des plus grands mythes intellectuels du vingtième siècle, est toujours parmi nous. Un groupuscule d'extrême gauche porte son nom et réalise des actions militantes énigmatiques, tandis qu'un poète se suicide à la BNF à la suite d'une conférence sur le penseur. Alertés par cette mort étrange, trois spécialistes de Benjamin se lancent à la recherche de son dernier manuscrit. Le trio nous entraîne dans une enquête vertigineuse, véritable labyrinthe de fragments, où à chaque nouvelle page se dessine un peu plus la figure de Walter Benjamin.Roman polyphonique virtuose, Le vingtième siècle donne à penser notre contemporanéité de manière singulière et originale, et à relire l'histoire du siècle passé comme celui dont Benjamin aurait été le héros.
Aux marches de l'Empire « à cent têtes et cent corps », sommeille une province minérale et nue où le froid, le givre, les bourrasques semblent ankyloser les habitants d'une bourgade qui ne signalait jusque-là ni notoriété historique, ni intérêt géographique, si ce n'est d'être placée à la frontière « d'un pays dont la bannière se frappait d'un croissant d'or », et dont la vitalité contraste avec l'épuisement ranci du village aux passions tristes.Un jour, le curé est découvert mort. La tête fracassée par une pierre. De quelle nature est le crime ? Qui pouvait en vouloir à ce curé d'une terre où les chrétiens et les musulmans vivaient depuis toujours en bonne entente ? Que faire, qui accuser, et qui entraver dans son action si, à partir de ce meurtre, s'ordonne toute une géométrie implacable d'actes criminels et de cruautés entre voisins ? Il y a un heureux : le Policier, Nourio, car « c'était fabuleux pour lui d'avoir une pareille affaire, dans ce lieu abandonné de toute fantaisie, de tout grain de sable, roulé dans l'ordinaire des jours ». Le voilà lancé dans d'inutiles recherches. À quoi sert de s'opposer au cours impétueux des choses ?Dans ce vieux monde de l'Empire qui s'affaisse, « dans un sommeil épais, s'enroulait dans sa léthargie comme un escargot fainéant bâille dans sa coquille », il y a tous les personnages, en chairs et en vices, qui conviennent au déroulement de la tragédie : chacun joue à merveille sa partition. Nourio, le Policier au teint olivâtre et aux pulsions incontrôlables. Baraj, l'Adjoint dont l'apparence de bête placide et musculeuse dissimule l'âme d'un enfant poète. Lémia, la fillette aux formes adolescentes dont les ombres et les pleins agacent les nerfs du Policier. Tant d'autres, et même les fantômes des temps passés, qui n'ont en commun, dans leur médiocrité âpre et satisfaite, dans le secret de leurs âmes, que d'agir en comparses du grand Effondrement de l'Empire. De suspens en rebondissements, l'intrigue haletante se double d'une grande réflexion sur nos errements contemporains, la volonté de quelques-uns de réécrire l'Histoire, la négation de certains crimes de masse et autres arrangements avec la réalité.
Soit deux comètes adolescentes engagées dans des pratiques anorexiques sévères les menant à confondre vie privée et privatisation de soi. Dans le creuset de ses réflexions autour du corps - fabriqué, policé, souffrant voire annihilé par nos sociétés modernes -, Espedite compose la géographie des délires adolescents, en parcourt les territoires, les soubassements, les impasses et les issues de secours. En suivant les voies de ces intériorités possédées, l'utérus en guise de graal.
« Qu'importe l'éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l'infini de la jouissance. » (Baudelaire) Tel serait l'esprit de cette saga lapidaire - un siècle de fureur et de sang que va traverser Valdas Bataeff en affrontant, tout jeune, les événements tragiques de son époque.
Au plus fort de la tempête, il parvient à s'arracher à la cruauté du monde : un amour clandestin dans une parenthèse enchantée, entre l'ancien calendrier de la Russie impériale et la nouvelle chronologie imposée par les « constructeurs de l'avenir radieux ».
Chef-d'oeuvre de concision, ce roman sur la trahison, le sacrifice et la rédemption nous fait revivre, à hauteur d'homme, les drames de la grande Histoire : révolutions, conflits mondiaux, déchirements de l'après-guerre. Pourtant, une trame secrète, au-delà des atroces comédies humaines, nous libère de leur emprise et rend infinie la fragile brièveté d'un amour blessé.
«C'était trop. Trop vite, trop tôt. Trop peu préparé à ce nouvel assaut de souffrance et de regrets. Trop de colère contre le destin. Trop de morts. Trop de prières et de miséricorde. Trop de Toussaint aux beaux jours. Trop de plus jamais.»En l'espace de six mois disparaissent successivement la mère et le frère de l'auteur. Tandis qu'ils affrontent la maladie surgit un secret qui réécrit l'histoire de la famille.
«Elle aurait pu renoncer. Elle aurait dû renoncer.Elle se le répéta bien un million de fois toutes les années qui suivirent. Elle eut d'ailleurs une hésitation, peut-être valait-il mieux rester, se rallonger dans la chambrée, à écouter ses deux autres soeurs qui gesticulaient dans leur sommeil, pétaient et miaulaient sous leurs draps à cause de leurs rêves lascifs tout juste pubères. Peut-être valait-il mieux abdiquer, enrager, et se délecter de sa rage, puisqu'il y a un plaisir dans l'abdication, cela va sans dire, le plaisir tragique de la passivité et du dépit, le plaisir du drapage dans la dignité, on ne nous laisse jamais rien faire, on a juste le droit de se taire, on nous enferme, alors que les autres là-bas au loin s'amusent et se goinfrent, qu'est-ce que j'ai fait dans mes vies antérieures pour mériter ça, oh comme je suis malheureuse.Peut-être aussi que le jeu n'en valait pas la chandelle. Mais le jeu, n'est-ce pas, en vaut rarement la chandelle. Le jeu n'est désirable que parce qu'il est le jeu.»Véronique Ovaldé, à travers l'histoire d'une famille frappée par une mystérieuse tragédie, ausculte au plus près les relations que nous entretenons les uns avec les autres et les incessants accommodements qu'il nous faut déployer pour vivre nos vies.
Justine Augier ("De l'ardeur", "Par une espèce de miracle"...) qui pratique et incarne une forme de pudeur et d'éthique littéraire assez uniques voit son projet d'écrire sur la littérature comme lieu de l'engagement entrer en collision avec la maladie et bientôt la mort de sa mère. Alors que la nature même de l'urgence mute, l'intime et l'universel se tressent dans un texte bouleversant de justesse et de clairvoyance. Et qui rappelle le potentiel devenir résistant de chaque lecteur.
À l'intersection du littéraire et du politique un livre bref et fulgurant qui trouve sa place entre Hannah Arendt et Joan Didion. Pas moins.
La journaliste et réalisatrice Stefania Rousselle ne croyait plus en l'amour. Elle avait couvert une série d'événements tragiques, des attaques terroristes de novembre 2015 à la montée de l'extrême droite. Sa relation personnelle s'était effondrée. Sa foi en l'humanité était ébranlée. Elle décida alors de partir seule sur les routes de France pour dormir chez des inconnus et leur poser la question à laquelle tout le monde cherche une réponse : c'est quoi l'amour ?
D'un boulanger en Normandie à un berger dans les Pyrénées, d'un élagueur en Martinique à une factrice dans les Alpes, "Amour" est un recueil de témoignages poignants et profonds, accompagnés de belles photographies (une centaine).